Né à Paris, le sénateur Dominique Clément de Ris (1750-1827) a exercé la charge de maître d'hôtel de la Reine avant de se rallier aux idées nouvelles au moment de la Révolution. Administrateur du département d'Indre-et-Loire, où il était grand propriétaire, il est appelé de Tours à Paris pour entrer en qualité de chef de section dans les bureaux de la Commission exécutive de l'instruction publique le 24 floréal an II, avant de devenir sénateur, puis comte de l'Empire et pair de France sous la Restauration.
Le 23 septembre 1800, six personnes s'emparent du sénateur en plein jour, dans son château de Beauvais, à Azay-sur-Cher, puis l'enferment dans la cave d’une ferme voisine. Les raisons de cet enlèvement sont longtemps restées obscures et ont été peu à peu dévoilées par les historiens. Alors que Napoléon Bonaparte mène une campagne difficile en Italie, son ministre de la police, Joseph Fouché (1759-1820) complote pour s’emparer du pouvoir en cas de défaite du premier consul. La victoire inattendue de Marengo vient contrecarrer ses plans. Fouché souhaite alors récupérer des documents compromettants qu’il avait échangés avec le sénateur d’Indre-et-Loire. Ses sbires, outrepassant ses ordres, enlèvent Clément de Ris. L’enlèvement d’un sénateur provoque la colère de Bonaparte. Pour sortir de cet imbroglio, Fouché échafaude un scénario machiavélique : Clément de Ris aurait été enlevé par des conspirateurs royalistes, des Chouans opposés au Consulat. Puis il met en scène une libération du sénateur au bout de 19 jours de captivité. Poursuivant la machination, le ministre fait ensuite porter les soupçons puis les accusations sur deux de ses ennemis personnels, Auguste de Canchy et Jean de Mauduison, favorables à la monarchie. Arrêtés, ils sont condamnés à mort à la suite d’un procès truqué et décapités à Angers en 1801 (1).
Cet épisode a très largement nourri l'inspiration d'Honoré de Balzac dans son roman Une Ténébreuse affaire. Il a pu en avoir écho par son père lui-même qui a exercé la fonction de directeur des vivres et des subsistances à Tours à partir de 1795, puis est devenu adjoint au maire en 1803 et a été administrateur des hospices de Tours. Le fait est que Dominique Clément de Ris a protégé Bernard-François Balzac en 1808 quand ce dernier a été mis en cause par le préfet Lambert, successeur de Pommereul, pour sa gestion des hospices. Même si le romancier a pris la précaution de délocaliser l’action en Champagne, on reconnaît en effet Clément de Ris dans le sénateur Malin de Gondreville, victime d’un enlèvement. Dans la préface de la première édition du roman, en 1843, Balzac apporte des précisions sur sa démarche de romancier, distinguant le type du personnage historique :
Il n’y a rien de commun entre le personnage de la scène intitulée : La Paix du ménage, qui reparaît dans celle intitulée : Une élection en Champagne, et le comte Clément de Ris : l’un est un type, l’autre est un des personnages de la Révolution et de l’Empire. Un type, dans le sens qu’on doit attacher à ce mot, est un personnage qui résume en lui-même les traits caractéristiques de tous ceux qui lui ressemblent plus ou moins, il est le modèle du genre.
LOUIS-PIERRE DESEINE (1749-1822)
Né à Paris, Louis-Pierre Deseine a suivi l'enseignement d'Edme Dumont avant d'entrer dans les ateliers de Guillaume Coustou puis d'Augustin Pajou. Il obtient le prix de Rome de sculpture en 1780 puis séjourne à la Villa Médicis de 1781 à 1784. Sculpteur néo-classique au service du prince de Condé Louis V Joseph de Bourbon-Condé, il demeure fidèle aux Bourbons sous la Révolution et l'Empire. Il a exécuté le buste de nombreuses personnalités publiques tel le sénateur Dominique Clément de Ris.
(1) Résumé établi par Régis Rech dans Balzac et sa joyeuse Touraine, cat. exp., Musée des Beaux-Arts de Tours, 8 novembre 2019-10 février 2020, p. 47.
